« C’était le grand désordre de printemps. Les forêts de sapins faisaient des nuages à pleins arbres. Les clairières fumaient comme des tas de cendres. La vapeur montait à travers les palmes des feuillages ; elle émergeait de la forêt comme la fumée d’un feu de campement. Elle se balançait et, au-dessous de la forêt, mille fumées pareilles se balançaient comme mille feux de campement, comme si tous les nomades du monde campaient dans les bois. C’était seulement le printemps qui sortait de la terre. (…)Les pâturages charrués de sources nouvelles chantaient une sourde chanson de velours, les arbres hauts craquaient d’un côté et de l’autre comme des mâts de navire. (…) Les branches encore sans feuilles étincelaient de mille petites flammes d’argent et, sous chaque flamme, dans la goutte d’eau brillante, les bourgeons neufs se gonflaient. Une épaisse odeur de sève et d’écorce fumait un moment dans l’air immobile. Le piétinement de la pluie passée descendait vers les fonds. La pluie nouvelle venait à travers les sapins, la bise retombait de tout son poids, les taches noires de la pluie et du soleil marchaient dans tout le pays sous une frondaison d’arcs-en-ciel. »
Jean Giono, Le chant du monde, Gallimard, 1934.

Primevères et cassiflore, printemps.
Primevères et cassiflore.

 

Cinq jours à Paris, entre Salon du Livre, rencontres et retrouvailles, cinq jours ont suffit à l’explosion du printemps dans le jardin laissé timide et regagné florissant. Le tapis de perce-neige, vives tâches blanches hivernales, laisse place aux grappes de primevères, le rose et le jaune pâle s’éparpillent entre les massifs, au creux des chemins, à l’ombre des arbustes qui commencent à fleurir. Déjà, avant le départ, surgissaient les crocus anarchiques esséminés au milieu de l’herbe, triangles violet et safran, jonchés sur de fines tiges aux feuilles claires.

 

 

Crocus, printemps
Crocus.

 

Dans le potager en carrés, deux batavias seulement ont résisté aux froids de janvier, en plus des aulx, oignons et fraisiers mais voici qu’arrivent les jeunes pousses, pois le long des treilles, radis, roquette, et courges en pagailles.

Au pied du tas de bois, le jaune d’or des jonquilles resplendit depuis plusieurs semaines, illuminant les prémices du printemps. Depuis notre retour du Paris, il est rejoint par les rose et bleu des jacinthes qui s’épanouissent en grappes, bulbes soigneusement plantés à l’automne, presque oubliés pendant hiver, surprises colorées.

 

Jonquilles.
Jonquilles.

 

Mon appareil photo a d’envie de sortir, j’ai une pile de livre à dévorer, et autant de chroniques à rédiger, c’est le printemps, et je vous retrouve très vite !